Update / three spaces in one, Dornbracht

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Update / three spaces in one, Dornbracht

2002

Pour Dornbracht, matali crasset a développé un projet prospectif, trois espaces d’expériences autour du bain : bain de lumière, de chlorophylle, de fraîcheur. Trois tentatives alternatives autour du bien-être. Pas un manifeste. Matières à penser. Pas d’autres convictions que ses propres sensations. Juste un autre pas de côté.

Energizer
Chacun d’entre nous a besoin d’une dose quotidienne d’exposition à la lumière. Naturelle ou artificielle. Le soleil ou la luminothérapie. Energizer, un espace matérialisé par des fluo dans lequel on pénètre pour vivre une expérience : rester quatre ou cinq minutes sous la lumière pour reprendre une dose d’énergie, disons même d’optimisme.
Rien à voir avec les lampes à bronzer au-dessous desquelles on s’allonge dans les centres UV. On ne s’endort pas. On reste conscient, réceptif.
On est plus près du rituel que pourraient évoquer les espaces de méditation telle la maison de thé japonaise. Après avoir gravi l’escalier, installé dans la combinaison d’astronaute comme dans un cocon, on reste debout, bras écartés. Une expérience quasi primitive et, en même temps, qui s’apparente à une préparation à un vol spatial destination soleil. Celui qui tente l’expérience est littéralement enveloppé par la lumière. Il se retrouve en lévitation, le corps en apesanteur. Presque un hommage, un peu incantatoire.
La lumière n’est pas blanche, elle est jaune. Ce n’est pas de la chaleur, mais la couleur du soleil, un ersatz de soleil. De l’énergie que l’on dirait positive.
Un laboratoire, ouvert. Les quatre générateurs posés dans les coins alimentent les fluo qui rayonnent. La combinaison d’astronaute est munie de ventouses-capteurs. À leur extrémité sont accrochés des témoins sur lesquels apparaissent des indications de dosage. Le système permet de moduler les besoins en lumière propres à chacun et aux différentes parties du corps.
L’espace est codé. La zone est sous contrôle. D’ailleurs, il ne faut pas en abuser. L’excès de lumière est dangereux. D’où la nécessité d’une enveloppe. Le corps est protégé de la lumière par une combinaison et une couche d’air. Il n’y a pas de contact direct avec la lumière.
Il est question de bien-être, conscient et inconscient. Et surtout de retrouver une dose d’optimisme à tout moment de la journée. On fait une pause, on se vide, on évacue le stress. Par exemple, le soir, plutôt que de se prélasser dans un bain, passer dans l’Energizer a un effet dynamisant. Il nous ramène à notre condition de machine humaine dans toute sa complexité. Ici, l’expression "recharger ses batteries" est prise au mot.

Phytolab
Un laboratoire ou une serre, une maison végétale ou un potager vertical… Phytolab est un espace dédié au bain. La nature est à portée de main pour contribuer à notre bien-être. Le bain constitue un moment privilégié du rapport au corps, dans l’hygiène et l’esthétique.
La nature est ici domestiquée. Triées, sélectionnées, échantillonnées, les plantes sont là essentiellement pour les bienfaits qu’elles procurent au corps.
Des modules. Chacun les construit à sa manière et selon son espace. Chaque plaque de plexiglas percée à la taille d’un pot porte une plante qui pousse de part et d’autre de la paroi. Il n’y a plus de relation à la terre, des cultures hors-sol. On respire. On ressent la fraîcheur des effluves de chlorophylle.
Dans l’espace organisé, les plantes sont immédiatement identifiables. Pas besoin d’étiquettes pour les nommer. Celui qui les cultive, suivant le rythme des saisons, sait les reconnaître. Il les a toutes mémorisées et les retrouve facilement selon leur emplacement. Elles sont accessibles, pour être regardées et touchées. Il connaît leurs vertus aromatiques et thérapeutiques. Il les a récoltées, les a échangées, les a ramenées de ses voyages… Une collection végétale qui se montre, mais reste dans la sphère de l’intime.
Les plantes vertes – voire les fleurs – sont à infuser, à inhaler, à verser dans le bain, à boire en décoction, à appliquer en "patch" ou bien à manger… Comme un cuisinier qui mêle les senteurs, qui reprend les recettes de sa grand-mère et en invente de nouvelles, on peut ici composer avec toutes ces espèces végétales à disposition.
Auprès de la baignoire, une extension-tablette est le support des rites de la préparation du bain. Elle se substitue à la coiffeuse, sans miroir. On n’a pas besoin de se voir, on se sent dans son corps.

Green Sofa
Green Sofa propose une vision prospective sur notre rapport au monde végétal. Il interroge une hypothèse : et si la nature était pensée autrement que sur le mode de l’exploitation et des ressources à transformer avant consommation ? Pourquoi ne pas intervenir en amont, à la manière des biotechnologies, sur la structure même des végétaux ? Et cette fois, non plus pour être au service de la productivité et des intérêts marchands, mais tout simplement au nom du confort, du bien-être ?
Les images de synthèse sont utilisées ici pour concevoir ce qui n’existe pas, pour aider à visualiser une pensée qui s’élabore. Tel un musicien qui s’exerce à découvrir toutes les finesses d’un nouvel instrument, ce travail cherche à exploiter le potentiel offert par l’outil informatique. Elles aident à imaginer l’artificiel plutôt que recopier une réalité.
Ce meuble de relaxation, ersatz de mobilier, est constitué de trois types de plantes programmées. Chaque type de plante a été créé pour répondre à une fonction particulière. L’une sert de support, l’autre exhale la nature et la troisième diffuse du son.
Le process. Un semis de graines dont on a programmé la croissance, la forme et la structure.
Au départ, une souche mère, lieu de fertilisation, porte cette végétation artificielle pour la nourrir. Les graines sont plantées sur un lit de semence muni de pores. Une juxtaposition de réseaux, la rhizosphère, une par type de plante, innerve cette matrice, transmet les énergies, les nutriments (oligo-éléments, éléments simples) et permet la photosynthèse. L’ensemble évoque des images simultanées de croûte terrestre et de composant électronique.
Le son, des petites vibrations, des bruits que l’on ne contrôle pas, à peine sensibles, comme une impression de souffle propre à la nature, une respiration.
La fraîcheur, comme une rosée qui exhale les senteurs de la nature.
Dans ce projet, la biotechnologie est mise au service d’une idée. Elle vise à redonner du bien-être, une proximité avec la nature. Une hypothèse de confort domestique végétal.

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Crédits

  • Uwe Spoering, courtesy Dornbracht
  • matali crasset productions